vendredi 23 décembre 2011

Für Immer Burgen - 1997



A la fin des années 1990, Wolfgang Tillman subit de nombreuses pertes dans ses amis causé par les ravages du sida. Pendant toute la décennie, le sida a donc tenu un rôle de premier plan, même s'il n'en fit pas directement un sujet de chronique. Néanmoins, les images des vêtements éparpillés évoquent tellement le désir et la perte qu'on ne peut s'empêcher de songer au sida. Ces objets inanimés compensent une absence ressentie comme intolérable par le sujet.

Für Immer Burgen (1997) est la photographie qui parle le plus explicitement du sida. On y voit une main robuste cherchant sur un lit la main d'un autre. Le pouce de cette seconde main est relié à un dispositif électronique, émettant une lumière rouge qui tranche avec le bleu institutionnel du lit, et nous signale que ce contact éphémère entre deux être a lieu dans le froid aseptisé d'une chambre d'hôpital. Personnellement, il me serait impossible de ne pas associer cette image au sida. Mais il serait erroné de penser qu'il n'y ai aucune autre signification possible à cette photographie. D'ailleurs, cela irait à l'encontre de l'affirmation de Tillmans "Je ne suis pas intéressé par une seule façon de voir, mais par la constitution de réseaux d'images et de significations capables de refléter la compléxité du sujet".





Lutz and Alex Climbing Tree - 1992

Lutz and Alex Climbing Tree - 1992


Sur cette photo on observe un homme et une femme nus dans un arbre, Lutz et Alex, deux des plus vieux amis du photographe, ses modèles les plus connues. Comme leurs prénoms ils sont tous deux androgynes, il est parfois difficile de les distinguer : Alex a les cheveux courts à la garçonne et d’une beauté rude, Lutz quant à lui a le crâne rasé. Alex est assise à cheval sur une branche elle nous fait face, et rit, joyeuse, pleine de vie tout en fixant l’objectif, comme pour afficher sa joie de vivre à la face du monde. Lutz lui se tient debout de dos sur une branche en dessous d’elle, comme pour cacher sa nudité, la tête courbée,  on ne peut distinguer ni son visage ni son expression, on ne peut que contempler ses jambes velues. Il a l’air embarrassé et affiche les premiers symptômes de la honte ou alors on peut supposer qu’il se concentre sur son ascension prochaine.
L’arbre sur lequel ils sont perchés est feuillue, la photo a donc dut être prise dans une forêt ou un bois dense. On pourrait alors s’interroger sur le symbolisme de l’arbre dans cette photo, qui est le symbole par excellence de la vie, de l’éternité, et de la renaissance.
A la base cette photo fait partie d’un shoot de mode transformé en une exploration poétique de la nudité. On pourrait croire à une photo de reportage, sur deux enfants sauvages des bois, ou sur une vie antérieur imaginaire, tel Adam et Eve dans le paradis perdu. L’image est à la fois drôle et attentive, lumineuse, colorée et poétique ! Elle témoigne comme nombre de ses photos, d’une jeunesse débridée, insouciante, joyeuse, pleine de vie, proche de la nature.


Lutz and Alex sitting in the trees - 1992

Wolfgang Tillmans - En bref -



Wolfgang Tillmans est un photographe – photographe de mode en particulier pour le magazine i-D - et artiste plasticien allemand né en 1968. C’est un artiste autodidacte et l’un des photographes les plus influents et novateur de sa génération.
Il vit et travaille entre Londres et Berlin.

Les magazines lui permettent d’élargir son espace d’exposition, d’approcher des gens et des sujets qu’il n’aurait jamais osé aborder. S’il s’intéresse autant à la photo de mode, c’est parce qu’il est fasciné par la représentation artificiel du soi-disant naturel : il aime le contraste, on pourrait croire que ses photos sont prises sur le vif mais elles sont mise en scène, pensées, composées et structurées pendant de longues heures de séance photo.
Il fait son apparition sur la scène internationale dans les années 1990, il déploie une œuvre inspirée des mouvements visuels underground allemands et britanniques, montrant des jeunes gens manifestant sans aucune retenue et aucune pudeur leurs identités, leurs désirs, leurs comportements…
Son regard neuf sur le quotidien et la jeunesse lui vaut en 2000 le prix Turner, qui est la plus prestigieuse distinction décernée en Grande Bretagne à l’art contemporain.
Il mêle sans compromis et sans contraintes, tous les genres traditionnels de la photographie jonglant entre : la photographie de mode (en particulier pour le magazine i-D), la nature morte, le paysage, le portrait, ainsi que l’expérimentation abstraite…  Créant ainsi des œuvres troublantes et innovantes.
Dans un premier temps ces photographies sont marquées par un engagement politique, ainsi il traite de l’écologie, des problèmes de logements, du racisme, de l’homophobie, et de la remise en question des normes sociales…
Il fait énormément de portraits de ses proches, amis ou rencontres de soirées, la sexualisation des postures, l’exhibitionnisme, l’embarras des corps fragiles, et la rugosité des regards, témoignes d’une jeunesse insouciante, débridée, en révolte contre la société qui l’étouffe et en qui elle ne se reconnait pas.
Son travail est néanmoins très contrasté : nombres de ses photos sont choquantes et provocantes, elles cassent tous les tabous liés au sexe et à l’homosexualité, mais elles sont à la fois emprises d’une certaine beauté, d’une poésie et d’une franchise infinie. Il recherche dans ses photos la beauté dans une réalité non-esthétique, et le dit lui-même
« l’esthétisme est devenue un enjeu ».
La lumière et les couleurs sont depuis les années 2000 une obsession qu’il poursuit et travaille sans cesse. Il fait de nombreux tests en chambre noir, lui donnant des séries de photos abstraites d’une grande poésie (ex : Urgency, Lighter).
Depuis 1990 il construit une histoire visuelle à la fois intime et collective, ses images sont chaque fois éprises d’une grande liberté, d’une décadence revendiquée mais aussi d’une tonalité plus sombre  à la fin des années 1990 (il subit de nombreuses pertes dans ses amis causé par les ravages du sida). De plus, lors de ses expositions il opère de constants aller-retour entre le passé et le présent, entre le souvenir et l’immédiat. Il capte ainsi une mémoire collective des émotions, des troubles et des bonheurs simples qui parsèment nos brèves existences.


lundi 17 octobre 2011

Un Chien Andalou - Luis Buñuel et Salvador Dali 1928



Un chien andalou est un court-métrage noir et blanc muet et surréaliste réalisé par  Luis Buñuel  en 1929 sur un scénario de Luis Buñuel et de Salvador Dali.
Le film étant inspiré des rêves de Salvador Dalí et de Luis Buñuel, qui raconte :
« En arrivant chez Dalí, à Figueras, invité à passer quelques jours, je lui racontais que j'avais rêvé, peu de temps auparavant, d'un nuage effilé coupant la lune et d'une lame de rasoir fendant un œil. De son côté il me raconta qu'il venait de voir en rêve, la nuit précédente, une main pleine de fourmis. Il ajouta : "et si nous faisions un film, en partant de ça ?" »
Après un court prologue nous montrant le réalisateur lui-même sectionnant avec un rasoir l’œil d’une jeune femme, ce film truffé d’images obscures. Il décrire les obstacles divers qu’un jeune homme rencontre pour rejoindre une femme qu’il désir. Néanmoins, la femme lui échappe finalement et se retrouve sur une plage avec un autre homme. La mer dépose alors des objets ayant appartenu au premier homme et qu’ils rejettent à la mer. Un court épilogue, une image fixe, nous montre l’homme et la femme enterrés dans le sable jusqu’aux épaules. Le plus étrange et le plus fascinant dans ce film, est son mystère. Quand bien même on connaîtrait toutes ces approches, il ne répond pas à une analyse précise, il possède une multitude de sens.






samedi 15 octobre 2011

Nan Goldin - The ballad of sexual dependency







Pour l’occasion de la quinzaine photographique Nantaise, le lieu unique expose une œuvre de Nan Goldin, the ballad of the sexual dependency (1981-1993).
Nan Goldin, est une célèbre photographe américaine né en 1953 à Washinton. Considérée comme une photographe militante et sensible, elle a le désir de photographier la vie telle qu’elle est, sans tabou : qu’il s’agisse de sexe, de drogue, d’amour ou de violence. Elle veut garder la mémoire des instants de sa vie et de celle de ses amies, avant qu’ils ne disparaissent.
Elle l’explique en interview "La photographie m’a sauvée la vie. Chaque fois que j’ai subi un évènement traumatisant, effrayant, j’ai réussi à survivre en prenant des photos (…) Mon travail tourne autour du fait de garder une trace des vies que j'ai perdues, pour qu’elles ne puissent pas être complètement effacées par la mémoire."
The ballad of sexual dependancy, est une œuvre profondément personnel et émotionnellement forte, mettant en scène la vie des marginaux de l’époque. C’est une série de 800 photographies contemporaines assemblées en un diaporama de 40 minutes, à la fois documentaire et autobiographique.
Ce sont des clichés percutants, voir même perturbant, dérangeant, mais qui touchent profondément le spectateur par leur sensibilité et leur humanité. Des corps qui s’enlacent, des sourires, des pleurs… Des êtres qui s’aiment, qui souffrent, qui vivent, qui meurent…
Le diaporama est séparé en plusieurs parties rythmé par la musique : Des femmes seules et en couple, des hommes seuls et en couple, des femmes enceints, la naissance, les enfants, le mariage, le sexe, la drogue, la séparation, la violence, puis la mort. Ces photographies représentent donc la vie tout simplement.
Le seul reproche que je pourrais donc faire à cette œuvre est la longueur, 40 minutes de photos c’est très long, mais à la fois court pour représenter la vie.
"Ceci est ma famille, mon histoire"

Bernar Venet investi Versailles

86.5° Arc x 16 - Place d'Armes




Après Takashi Murakami et Jeff Koons, c'est au tour de Bernar Venet de s'approprier les Domaines de Versailles et de Marly. Il y installe donc 7 oeuvres monumentales crées spécifiquement pour ce lieu, du 1er Juin au 1er Novembre 2011.
Ce sont des structures contemporaines, simple, épurées, mais néanmoins très poétiques. Elles représentent des arcs de cercle superposés, décalés, entrelacés en fer, couleur cuivrés.

Elles sont vraiment imposantes, néanmoins malgré la lourdeur du matériau et l'aspect gigantesque et presque effrayant qu'elles dégagent, elles donnent une impression de fluidité, de légèreté et de calme. Les deux structures encadrant la statue de Louis XIV s'inscrivent parfaitement dans le panorama. Elles rajoutent à l'aspect symétrique de la place, un coté majestueux, et presque fantastique. Fantastique, par les ombres qu'elles doivent projetés au sol. Ces ombres portés démesurées et ces gigantesque arcs de cercle ajoute ainsi un aspect presque effrayant aux oeuvres, qui tiennent debout par je ne sais quel miracle.

Le spectateur doit se sentir minuscule, impuissant, démuni, voir même dominé face à ses monstres de fer ! Personnellement je serai à la fois fascinée et effrayée : fascinée par leur taille et l'aspect de fluidité, de calme qu'elles dégagent, mais néanmoins effrayée car j'aurai l'impression qu'à tout moment elles ne s'écroulent sur moi et m'écrasent de leur poids.